Une des grandes spécificités du contrat d’agent commercial est que ce dernier a droit à être indemnisé quand la rupture émane du mandant dès lors que les juges ont constaté que l’agent n’a pas commis de faute grave (article L134-12).

Selon une jurisprudence constante, le montant de l’indemnité compensatrice équivaut au montant des commissions perçues sur deux années (moyenne des trois dernières années avant la cessation du contrat ou de la première année si les relations contractuelles n’ont duré qu’une seule année).

Cette demande d’indemnité compensatrice n’est assortie d’aucun formalisme particulier et est soumise à la prescription annale.

En application de l’article L. 134-13, 2° du Code de commerce, l’indemnité n’est pas due, notamment « lorsque la cessation du contrat résulte de l’initiative de l’agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l’âge, l’infirmité ou la maladie de l’agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ».

Si l’on se tient à la retranscription littérale de cet article L. 134-13, 2° du Code de commerce, l’âge, l’infirmité ou la maladie n’est pas suffisant en soi pour ouvrir droit à une indemnité compensatrice pour l’agent commercial qui prend l’initiative de cesser ses relations avec le mandant.

Il convient également que cet âge, cette infirmité ou cette maladie ait pour conséquence d’influer sur la poursuite de son activité, « laquelle ne peut plus être raisonnablement exigée. »

La Cour de cassation a suivi cette interprétation littérale du Code de commerce.

Dans un arrêt du 8 février 2011, elle a ainsi jugé que le motif du départ à la retraite n’était pas à lui seul exonératoire de l’indemnité compensatrice.

Alors que les décisions de Cour d’appel étaient jusque-là contradictoires les unes avec les autres, la Cour de cassation s’est dans ce cas d’espèce prononcée pour la première fois sur les conditions du droit de l’agent commercial à l’indemnité de cessation de contrat, lorsque l’agent en a pris l’initiative pour prendre sa retraite.

L’agent commercial reprochait à la Cour d’Appel d’avoir violé les articles L. 134-12 et L.134-13 du Code de commerce pour avoir retenu qu’il appartenait à l’agent commercial d’établir l’incompatibilité de son mandat avec son état de santé au-delà de son soixantième anniversaire et pour avoir considéré que n’ayant pas fait état dans ses courriers des 30 juin 2005 et 27 juin 2006 de son incapacité physique à poursuivre son contrat au-delà du 30 juin 2006,

Il ne pouvait soumettre au juge saisi les certificats médicaux tendant à établir qu’il connaissait des difficultés cardio-vasculaires depuis 2003.

La Cour de cassation a jugé que l’agent commercial avait, pour des raisons qui lui étaient personnelles, décidé de cesser toute activité professionnelle à l’âge de la retraite fixée à soixante ans et qu’aucun élément particulier ne démontrait que cet âge rendait déraisonnable la poursuite de son activité professionnelle, seul son choix personnel de prendre sa retraite étant à l’origine de la cessation de ses relations avec son mandant.

Dans son courrier du 30 juin 2005, il faisait savoir au mandant qu’il cesserait ses activités professionnelles un an plus tard, le 30 juin 2006, pour cause de départ à la retraite sans faire mention à une quelconque impossibilité physique liée à son âge de poursuivre son activité.

L’agent commercial n’avait de fait invoqué des problèmes de santé que le 24 septembre 2007 dans son assignation aux fins de solliciter l’octroi d’une indemnité compensatrice.

Compte tenu de ces circonstances, la Cour de cassation :

• a cassé l’arrêt qui avait considéré que le fait que l’agent n’avait pas mentionné l’existence des problèmes de santé lors de sa demande d’indemnité ne l’empêchait pas d’établir devant le juge saisi qu’à la date de la cessation de ses fonctions la poursuite de son activité ne pouvait plus être raisonnablement exigée du fait de son état de santé ;

• a retenu que la Cour d’Appel n’avait pas donné de base légale à sa décision dès lors qu’elle n’avait pas recherché si l’âge de soixante ans et les circonstances particulières de la situation personnelle de l’agent étaient susceptibles de ne plus lui permettre raisonnablement de poursuivre son activité ;

Toutefois, eu égard à la position de la Cour de cassation dans cet arrêt du 8 février 2011 non démentie par cette dernière depuis, nous ne pouvons qu’alerter les agents commerciaux sur l’existence d’un risque très réel que l’indemnité compensatrice ne soit en définitive pas retenue lorsque la rupture du contrat de mandat n’est motivée que par un départ en retraite sans aucune évocation d’un quelconque élément lié à la santé.