Chambre Sociale de la Cour de cassation, 10 janvier 2012

De prime abord, l’arrêt du 10 janvier 2012 peut paraître surprenant. La Cour de cassation y censure les juges pour avoir considéré que les enregistrements réalisés au moyen d’un système de vidéosurveillance installé par un client de l’employeur constituent une preuve licite des heures d’arrivée et de départ des salariés.

En effet, même si, par principe, l’employeur a une obligation de transparence qui lui impose d’informer ses salariés de la mise en place d’un dispositif visant à contrôler les activités, notamment par voie d’enregistrement, on sait que la jurisprudence admet deux tempéraments à cette obligation.

D’abord l’employeur peut produire en justice des enregistrements réalisés à l’insu du salarié lorsque ce n’est pas lui qui a mis en place le procédé au moyen duquel ces enregistrements ont été réalisés. Tel est le cas, par exemple, des relevés de communications téléphoniques fournis par un opérateur téléphonique. Sont également considérés comme loyaux, les éléments de preuve recueillis de manière incidente au moyen de dispositifs dont la finalité n’est pas le contrôle des salariés. Il en va ainsi, par exemple, des systèmes de vidéosurveillance mis en place pour contrôler un entrepôt dans lequel le salarié ne travaillent pas.

En l’espèce, l’employeur obtient le droit de visionner les enregistrements des caméras de vidéosurveillance placées à l’entrée de la société cliente où ses employés effectuent leur mission de nettoyage. Il peut ainsi établir un relevé des heures d’arrivée et de départ de ses salariés. Le procédé ayant permis la collecte de ces informations n’ayant pas été mis en place par l’employeur, on aurait pu penser, comme la cour d’appel, que « les enregistrements litigieux constituent un moyen de preuve licite ». D’autant que la vidéosurveillance n’avait pas pour but ici de contrôler le travail des salariés mais de surveiller les portes d’accès aux locaux pour renforcer la sécurité.

Tel n’est pas l’avis de la Cour de cassation qui considère que dès lors que le système de vidéosurveillance permet « le contrôle de l’activité » des salariés, ces derniers doivent être informés de son existence. A défaut, les éléments de preuve recueillis au moyen de ce système sont déloyaux.

Au vu de cet arrêt, ce qui paraît déterminant pour délimiter le champ d’application de l’obligation de transparence de l’employeur est avant tout la finalité du procédé de contrôle, même lorsque ce dernier n’a pas été mis en place directement par l’employeur. L’installation d’une surveillance vidéo des portes d’accès de locaux au sein desquels les salariés travaillent a nécessairement pour finalité le contrôle des entrées et sorties. Ainsi, même si ces derniers ne sont pas les seuls visés par  ce dispositif, il en résulté pour les salariés un contrôle de leur activité dont ils doivent être informés. A défaut de quoi, les éléments de preuve recueillis ne peuvent être produits en justice.