Le droit au bail est un élément du fonds de commerce. Sa disparition entraîne potentiellement la disparition du fonds, ou en tous cas un amoindrissement conséquent de sa valeur. C’est la raison pour laquelle les créanciers inscrits sur le fonds doivent être avertis en cas de résiliation du bail commercial.

L’article L143-2 du code de commerce prévoit ainsi que le bailleur qui souhaite demander en justice la résiliation du bail doit notifier cette demande aux créanciers inscrits. Il est précisé que le jugement ne peut intervenir qu’un mois après cette notification. La résiliation amiable est également visée par cette disposition : elle ne devient définitive qu’un mois après la notification aux créanciers inscrits.

Cette règle a pour but de permettre aux créanciers de préserver leur gage en leur offrant la possibilité, dans le délai d’un mois, d’exécuter les obligations à la place du locataire, c’est-à-dire de régler les loyers impayés afin de sauvegarder le bail.

L’obligation de notification a un champ d’application très large puisqu’elle concerne tout type de bail commercial (écrit ou verbal, initial ou renouvelé) et tout type de résiliation (amiable ou judiciaire, y compris la demande tendant à constater le jeu de la clause résolutoire).

La notification doit être faite à tous les créanciers inscrits au jour de la demande. Plus précisément, elle doit être effectuée au jour de l’assignation et au plus tard un mois avant le prononcé du jugement. Elle doit contenir toutes les informations permettant au créancier d’apprécier l’intérêt d’un règlement de la dette à la place du débiteur. Une simple publicité dans un journal d’annonces légales ne serait suffisante.

A défaut de notification, la résiliation est inopposable au créancier inscrit. Celui-ci pourra donc former tierce opposition pour réclamer la rétractation de la résiliation, et pourra se comporter comme si la résiliation n’était jamais intervenue. En outre, le créancier pourra réclamer des dommages et intérêts, mais à condition de démontrer un préjudice résultant du manquement du bailleur, préjudice tenant à la perte de la valeur de son gage. Dans un arrêt récent du 9 novembre 2011, ma Cour de cassation a précisé que le créancier inscrit n’est pas fondé à obtenir des dommages et intérêts lorsque son préjudice résulte de sa propre inertie (Civ 3ème 9 novembre 011 n°10-20.021).

La jurisprudence relative aux dispositions de l’article L143-2 du code de commerce est abondante et en fait une application stricte. Il est notamment indifférent que le créancier ait eu connaissance des défaillances du locataire, ou que la notification n’ait pu avoir aucun effet quant à l’étendue du gage du créancier: à défaut de notification régulière, le créancier pourra systématiquement invoquer l’inopposabilité de la résiliation et réclamer des dommages et intérêts le cas échéant.

Dès lors, il est très important de veiller au parfait respect des dispositions de l’article L143-2 du code de commerce lors de la résiliation judiciaire ou amiable du bail commercial compte tenu des conséquences graves qui peuvent résulter pour le bailleur d’un défaut de notification régulière.